Les critères de distinction (D), homogénéité (H) et stabilité (S), résumés par les initiales DHS, ainsi que la façon de les mesurer, sont définis officiellement dans le Règlement technique d’examen des variétés en vue de leur inscription au catalogue officiel français (il existe un règlement technique spécifique à chaque espèce [1]).
Tout d’abord, la distinction. « Une variété est distincte si, au moment où l’inscription est demandée, elle diffère nettement par un ou plusieurs caractères morphologiques ou physiologiques de toute autre variété connue (...) ». La distinction est établie au cours des deux cycles d’étude à partir des observations recueillies pendant toute la durée de la culture. La nouvelle variété est comparée à la variété ou au groupe de variétés les plus proches « de toute autre variété connue dans la Communauté » [2]. En cas de difficulté particulière de distinction, « une expérimentation spéciale pourra être mise en place pour établir la distinction entre la variété en étude et la (ou les) variété(s) la (ou les) plus proche(s) ».
L’homogénéité et la stabilité excluent les populations multipliées en pollinisation libre
Deuxième critère : l’homogénéité. « Une variété est suffisamment homogène si les plantes qui la composent sont, compte tenu des particularités de leur système de reproduction, semblables pour l’ensemble des caractères utilisés pour établir sa description ». Comme pour la distinction, l’homogénéité est mesurée sur deux cycles d’étude, avec une faible tolérance d’éléments « hors-type » (autour de 3 % pour les lignés pures et les hybrides d’espèces autogames [3], 6 % pour les variétés populations et hybrides d’espèces allogames [4], 10 % pour les variétés de conservation).
Enfin, troisième critère : la stabilité. « Une variété est stable si, à la suite de ses reproductions ou multiplications successives, ou à la fin de chaque cycle au cas où le déposant a défini un cycle particulier de reproduction ou de multiplication, elle reste conforme à la définition de ses caractères essentiels ». La stabilité est exigée pour l’ensemble des caractères utilisés pour la distinction.
Concrètement, les taux d’homogénéité et la stabilité se mesurent sur les caractères phénotypiques (morphologie ou caractères - comme la résistance à un pathogène - visibles), « à la fin de chaque cycle de multiplication particulier » déterminé par l’obtenteur. Pour l’obtenteur, un cycle se termine sur la génération qui sera vendue comme semences, les générations suivantes éventuellement multipliées par l’agriculteur pouvant ne plus être homogènes et stables [5]. Prenons le cas des hybrides F1 : ils sont obtenus en croisant deux lignées parentales génétiquement éloignées. Le premier croisement de ces deux lignées donne une population totalement homogène, l’hybride F1, celui que vend le semencier et que sème l’agriculteur. Mais dès la deuxième génération (si l’agriculteur resème des grains F2 obtenus de la récolte des F1), il y a de nombreuses disjonctions des caractères parentaux puisqu’ils n’ont pas été stabilisés. La génération F2 donne donc des individus tous très différents les uns des autres et de leurs parents. Mais peu importe pour leur inscription au catalogue : la première génération (« fin d’un cycle de multiplication ») est effectivement stable et homogène, les critères DHS sont donc bien remplis.
On verra dans un prochain article [6] que ces critères DHS, même légèrement assouplis pour les variétés de conservation, freinent considérablement l’inscription des populations paysannes, par essence non homogènes et stables.